La médiation des litiges de la consommation

Le 28 octobre 2015, le club des médiateurs de services au public a organisé à Bercy, à l’occasion de sa deuxième conférence annuelle sur le thème « La médiation étendue à tous les secteurs de la consommation – échanges sur l’esprit, les moyens et la méthode ».
Ci-joint le compte-rendu qu’en a fait sur son site M Pierre Guerder, Doyen honoraire de la Cour de cassation, Secrétaire général honoraire de l’AHJUCAF.

Paru dans Village de la Justice https://www.village-justice.com/articles/Mediation-Reglement-extra,20282.html

Par Laurent Denis, Juriste. – mercredi 26 août 2015

La médiation des litiges de consommation est modernisée et généralisée.

Transposant la Directive 2013/11/UE du 21 mai 2013 sur le règlement extra-judiciaire des litiges de consommation (« REL »), l’ordonnance 2015-1033 du 20 août 2015 offre désormais la possibilité aux consommateurs de recourir à d’autres solutions que l’action judiciaire directe, dont les avantages comme les contraintes sont bien cernés.

Naissance d’un « droit à la médiation de consommation », y compris dans les domaines bancaire, des crédits, des paiements, de l’assurance, de l’épargne, de la finance ou des investissements, épaulé par des dispositifs de traitement des litiges en ligne.

Ses dispositions seront applicables une fois connues leurs modalités, dans un délai de deux mois après la promulgation du Décret d’application désormais attendu.

1. Champ de la Médiation de consommation.

L’article L. 152-1 pose le principe de ce nouveau droit mis à la disposition des consommateurs, et de l’obligation corrélative, permanente, incombant aux professionnels : « tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l’oppose à un professionnel. A cet effet, le professionnel garantit au consommateur le recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation ».

Le Livre Ier du Code de la consommation se voit pourvu d’un titre V « Médiation des litiges de consommation ». Une série d’articles nouveaux font ainsi leur apparition. L’article L. 151-1 g précise que constitue un « Médiateur de la consommation », « la personne physique ou la personne morale accomplissant une mission de médiation conventionnelle ».

La médiation des litiges de la consommation s’applique largement.

Tous les litiges relatifs à un contrat de consommation sont concernés par les dispositions, à l’exception (art. L. 151-4 du Code de la consommation) de ceux concernant : des services d’intérêt général non économiques, des services de santé fournis par des professionnels de la santé aux patients (y compris la prescription, l’administration et la fourniture de médicaments ou de dispositifs médicaux), des services rendus par des prestataires publics de l’enseignement supérieur.

Pour les autres activités, sont exclus de la médiation (article L. 151-3 du Code de la consommation) : les litiges entre professionnels, les réclamations portées par le consommateur auprès du service clientèle du professionnel, les négociations directes entre le consommateur et le professionnel, les tentatives de conciliation ou de médiation ordonnées par un tribunal saisi du litige de consommation, ainsi que les procédures introduites par un professionnel contre un consommateur.

2. Processus de Médiation et sites internet dédiés.

Les articles L. 152-1 et suivants du Code de la consommation précisent la procédure à suivre pour le consommateur souhaitant recourir à un règlement de litige sans passer directement par un Tribunal civil.

Le processus de médiation est précisé par Décret en Conseil d’Etat (même article L. 152-1 du Code de la consommation). L’ensemble des dispositions sera applicable deux mois après la promulgation de ce décret, délai laissé aux professionnels pour se placer en conformité.

Ainsi, « tout professionnel communique au consommateur […] les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève. Le professionnel est également tenu de fournir cette même information au consommateur, dès lors qu’un litige n’a pas pu être réglé dans le cadre d’une réclamation préalable directement introduite auprès de ses services » (art. L. 156-1 du Code de la consommation).

Le professionnel informe également les consommateurs des modalités d’application de l’article 14 du Règlement UE n° 524/2013, du 21 mai 2013. Tout défaut dans cette obligation d’information à deux composantes peut être sanctionné d’une amende de 15.000 euros, au plus (art. L. 156-3 du Code de la consommation).

En contrepartie notable, en regard de la pratique contractuelle, il devient interdit de contraindre contractuellement le consommateur à recourir à la médiation avant la saisine d’un Juge : « est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge  » (art. L. 152-4 du Code de la consommation). Ces clauses se sont, pourtant, largement répandues et efficaces pour propager une solution de traitement des litiges mal connue des consommateurs.

La proposition active et claire de Médiation devient la règle, de la part du Professionnel ; la voie de la Médiation « forcée » lui devient interdite.

En point également notable, le Médiateur dispose nécessairement d’un site internet permettant le dépôt des saisines ou des demandes (art. L. 154-1 du Code de la consommation). Internet vient utilement contribuer à la diffusion de cette nouvelle voie de règlement des litiges.

Le Médiateur rend publiquement des comptes quant à son activité de médiation de consommation.

3. Le statut de Médiateur de la Consommation et son contrôle.

Le statut du médiateur de consommation est précisé aux articles L. 153-1 et suivants du Code de la consommation.

Classiquement, ses quatre qualités fondamentales d’indépendance et d’impartialité, de diligence et de compétence, sont rappelées (art. L. 153-1 du Code de la consommation). Il devra être inscrit sur la liste des Médiateurs nationale, notifiée à la Commission européenne, selon des modalités précisées par Décret. Il peut être rémunéré exclusivement par le professionnel, ou non. Dans le premier cas, des conditions supplémentaires d’exercice s’imposent.

Il est instauré une Commission d’évaluation et de contrôle de la Médiation de consommation (CECMC). Celle-ci tient notamment à jour la liste des Médiateurs, contrôle leur régularité et évalue leurs activités (art. L. 155-2 du Code de la consommation).

Dans les domaines bancaire et assurantiel, le principe de gratuité de la Médiation est rappelé : « tout consommateur a droit de recourir gratuitement à un médiateur dans les conditions prévues au titre V du livre Ier du code de la consommation en vue de la résolution d’un litige qui l’oppose à un établissement de crédit, une société de financement, un établissement de monnaie électronique ou de paiement et relatif aux services fournis et à l’exécution de contrats conclus dans le cadre du présent titre et du titre II du présent livre et relatifs aux produits mentionnés aux titres Ier et II du livre II » (nouvel article L. 316-1 du Code monétaire et financier).

L’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) est consultée par la Commission d’évaluation et de contrôle de la Médiation de consommation, quant à l’activité des Médiateurs agissant en banque, crédit, épargne, paiements, assurance ou finance.

Le Comité Consultatif du Secteur Financier, CCSF (art. L. 614-1 du Code monétaire et financier) disposera d’un organe collégial pour désigner des Médiateurs, pour les Etablissements agréés (crédits, paiements, monnaie électronique, assurance) ou des Intermédiaires en assurance, banque, finance (IOBSP, IAS, CIF, CIP et IFP) qui en feraient la demande.

Dans le domaine financier, le Médiateur de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) entre dans les dispositions du Code de la consommation (nouvel art. L. 621-19 du Code monétaire et financier).

Texte complet de l’Ordonnance 2015-1033 sur le site Légifrance :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=0400AF5980174C6338B128FA4B3281D1.tpdila10v_3?cidTexte=JORFTEXT000031070940&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000031069867

Décret d’application : à paraître.

Laurent Denis

Juriste – Droit bancaire et financier – Droit et Conformité des Intermédiaires

Intervenant à l’ISFI / Formations d’Intermédiaires (www.isfi.fr)
www.droit-distribution-bancaire.fr
www.endroit-avocat.fr

Cette publication a un commentaire

  1. Gemme France

    C’est un article intéressant à lire, et qui fait bien la synthèse.

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